mardi 31 janvier 2012

Sur Les Traces Des Percherons

Aux temps préhistoriques (entre 1870 et 1914), des hordes de percherons sauvages parcouraient en liberté collines et vallées du Perche. Une époque bien révolue.
Devenu réserve naturelle, le Parc du Perche ne compte plus que quelques troupeaux de percherons à demi sauvages. Le voyageur qui traverse cette terre cabossée, ne se fiant qu'au hasard pour guider ses pas, n'a aucune chance de les apercevoir. C'est seulement accompagné d'un guide local qu'il pourra peut-être faire la rencontre de sa vie, tant ces animaux sortis de la nuit des temps impressionnent par leur taille et leur puissance.
L'hiver nous offre cependant l'occasion de rencontres inespérées en d'autres saisons, en particulier par temps de neige. Hier matin, c'est accompagné d'un vieux chasseur de percherons que je suis parti à la recherche de l'animal emblématique du Perche. Après plusieurs kilomètres d'une marche harassante dans au moins un centimètre de neige, mon vieil ami est resté en arrêt devant ce qu'il m'a assuré être des traces toutes fraîches de percherons.
"Ils viennent de passer par là", m'a-t-il dit.
Gardant le silence et marchant face au vent pour dissimuler notre odeur, nous avons poursuivi notre approche, bientôt récompensés par la vue d'un troupeau d'une quinzaine de percheronnes occupées à se frayer un chemin dans la neige.
Dans le froid et la tempête, nous sommes restés de longues minutes à admirer ce spectacle superbe. J'en ai presque oublié de sortir mon téléphone portable pour prendre quelques photos souvenirs pour bluffer mes amis de Facebook.

lundi 30 janvier 2012

Élodie dans le Calvados

Ses origines géographiques auraient dû l'inciter à se rapprocher des traits poitevins. Or depuis des années, on l'a aperçue à maintes reprises faisant du débardage avec les traits bretons de Jean-Jacques Séité ; on l'a vue dans un rôle de surveillance "montée" avec les percherons de l'Arche de la Nature au Mans ; ou encore chevauchant les percherons diligenciers de l'écurie Mulowsky dans le Loir-et-Cher.
Cette fois, Élodie Baudin innove. Elle visite le Calvados. Enfin... pour être plus précis, elle séjourne dans un bois de résineux sur un terrain pentu, à une dizaine de kilomètres de Thury-Harcourt.
Associée à Christine Sallé, elle débusque les grumes fraîchement abattues, fruits d'une première éclaircie, sur ce chantier rendu exigeant par une topographie qui fait du débusquage et du débardage un exercice difficile. Les deux femmes font équipe, avec le soutien de deux traits... comtois. Oliver, un habitué du débardage et Tarès, un entier qu'on avait un temps préparé à une carrière dans le spectacle mais qui entame une reconversion dans le débardage.
L'abattage, directionnel comme il se doit, reste une affaire de gros bras, ceux de Jean-Baptiste Ricard et de Mathieu Sallé.

dimanche 29 janvier 2012

Oser Le Cheval Territorial

  • Nayak quitte la cantine scolaire pour rejoindre l'école.

Nayak, le postier breton, est devenu leur ami. C'est avec un grand plaisir que les enfants de l'école maternelle Françoise d'Amboise à la Chapelle-Gaceline dans le Morbihan retrouvent les jours de classe le placide cheval de trait à l'heure du déjeuner.

  • Norbert Lelièvre, le meneur, avec Nayak.

  • À midi, Nayak attend les enfants devant l'école pour les transporter à la cantine.

  • Norbert Lelièvre et Jacqueline Coué, son groom, accompagnent les enfants à la cantine.

Déterminé à oser le cheval territorial dans sa petite commune de 720 habitants, Pierrick Lelièvre, le maire, avait d'abord envisagé un service de ramassage scolaire qui relierait sa commune et celle de Quelneuc à 7 km. Compte tenu de la distance et des bosses du parcours, l'idée n'avait pas reçu l'aval des Haras nationaux, consultés sur la faisabilité du projet.

Au même moment, le déplacement de la cantine scolaire, installée dans des locaux mieux adaptés, à 1 km de l'école, offrait une seconde chance au maire de faire naître son projet de transport scolaire à l'aide d'une voiture hippotractée. C'est au début de 2010 que Nayak, trait breton formé au travail chez Jeannot et Laurence Maubec à Porcaro, a pris ses fonctions de cheval territorial.

  • Une assistante maternelle ou une personne de la mairie effectue le parcours avec les enfants dans la voiture.

Les jours de classe, Nayak transporte environ 25 enfants sur le chemin de la cantine. Il effectue en fait deux voyages, prenant à chaque fois un peu plus d'une dizaine d'enfants. Avec les deux retours vers l'école, Nayak accomplit entre midi et 13 h 30 un peu moins de 8 km dont la moitié à vide. Un jeu d'enfants pour le solide breton.

En période estivale, on demande à Nayak de rendre quelques services dans l'entretien des espaces verts et l'arrosage des fleurs. Des tâches qui pourraient aller en augmentant et qui occuperont aussi Ugo, jeune trait breton appelé à seconder Nayak dans ses activités de cheval cantonnier.

  • L'école aura peut-être un jour une fresque à l'effigie de Nayak ?

Pensée Dominicale

vendredi 27 janvier 2012

Jour de Concours À Nogent > 1ère Partie

La création de la SHPF en 1883 a donné naissance à un concours national annuel du cheval percheron qui réunissait entre 300 et 400 des plus beaux spécimens de la race.
H. de Loncey, dans le journal L'Acclimatation, a fait un récit très détaillé du concours 1889 qui s'est déroulé à Nogent-le-Rotrou. Ce texte donne une idée de l'importance que revêtait le concours national à cette époque.
Nous allons publier cet extrait de l'article de Henri de Loncey en le découpant en trois parties, à lire aujourd'hui et les deux prochains samedis.

  • Voltaire, par Rosa Bonheur, 1er Prix du concours de Nogent-le-Rotrou en 1884.

"... Ajoutons à ces qualités qui constituent l'éleveur chez le Percheron, de l'aménité dans le caractère. Il est hospitalier, s'il vous invite, il ne veut pas que vous le regrettiez. C'est ainsi que pour son concours, il avait organisé un programme de fêtes et de distractions permettant à ses hôtes de ne pas s'apercevoir de la monotonie d'un séjour prolongé dans une petite ville -très bourgeoise, très proprette, il est vrai, mais peu folâtre en l'espèce.

Le jeudi 15, nous avons eu un lâcher de pigeons dont la Société colombophile d'Alençon avait pris la direction, Nogent-le-Rotrou n'ayant pas encore admis ce sport dans le catalogue de ses attractions. À 2 heures 35, la Place du Marché a vu pour la première fois une envolée de 150 pigeons voyageurs, sortant d'abord inopinément des cages, puis hésitant, cherchant leur orientation et finalement partant à tire-d'aile vers une même direction. Le coup d'oeil était gracieux, joli à voir, aussi le public nous a-t-il paru s'y intéresser. La première dépêche reçue nous annonçait l'arrivée à Alençon de la collection Adam à 3 h 11. Puis la musique municipale nous a régalé d'un concert ; le soir, fête de nuit avec illuminations a giorno, lanternes vénitiennes, bal en plein air, sociétés chorales, que sais-je encore ! Et pour clôturer dignement cette journée d'ouverture, un feu d'artifice qui eût donné à songer à Ruggieri lui-même ! Le vendredi, nous avons été tout entier aux premières opérations du jury. Samedi, temps maussade ; le matin, grand déjeuner auquel nous avons été invité, offert à MM. les vétérinaires chargés par le comité du stud-book de marquer les chevaux inscrits ; le soir, nous avons eu une retraite aux flambeaux très animée et fort pittoresque. Toutefois, on sentait percer chez les éleveurs attablés dans les principaux cafés un certain mécontentement ; il était évident pour un observateur -comme doit l'être tout publiciste- que ces gens très pratiques concevaient quelques inquiétudes dans les résultats pratiques de leur concours. Nous questionnâmes l'un d'eux et il nous apprit que M. Dunham, le célèbre éleveur américain qui, depuis l'ouverture des concours percherons, se rendait maître du marché, donnait des prix importants, et somme toute leur faisait gagner la forte somme, n'avait pas donné signe de vie cette année. Un seul Américain, M. Elwood, avait fait quelques achats importants, mais ne trouvant pas son redouté rival sur les lieux, il en avait profité pour obtenir des prix beaucoup moins avantageux, quelque chose comme 1500 francs de moins par étalon -ce qui est bien quelque chose".

La suite, samedi 4 février.

  • Enseigne de la SHPF, à Nogent-le-Rotrou.

On Nous A Envoyé

Jean-Yves Branlard.
Amazones lors de la fête du Chausson aux pommes de Saint-Calais.
Randonnée à l'occasion d'une cousinade.
Travail au manège à la fête de Valennes.
Débourrage d'Ujoleuse d'Atout.
Marine montée sur Navette au Mondial 2011.
Pendant la visite des enfants du Centre aéré de Bonnétable.
Pierre-Yves Berger.
Après avoir vu la belle Surannée sur ce blog, Pierre-Yves Berger nous dit, photo à l'appui, que deux bronzes de Surannée ont été réalisés en 1923.
Catherine Manceau.
Nous sommes heureux que Catherine nous donne des nouvelles de Sissi et Voyou, qui se portent très bien.

lundi 23 janvier 2012

Sur La Bonne Pente

Que de fois n'a-t-on dit avec une moue réprobatrice d'untel, individu peu conformiste au comportement marginal, qu'il était sur la mauvaise pente...
C'est donc avec plaisir que j'ai entendu Gilles Marty et Frédéric Destailleur dire, en parlant d'eux-mêmes, qu'ils étaient sur une bonne pente. Une pente émaillée de pièges sournois, matérialisés par des dizaines de plaques rocheuses dissimulées sous quelques centimètres d'humus. Faute d'érudit sous la main, il ne nous sera pas possible de vous dire de quel type de concrétions rocheuses il s'agit.
Sur ces bonnes pentes synonymes d'exploitation classique (entendez mécanisée) impossible, on pense en solution de dernier recours au cheval. Une situation qui, d'ailleurs, agace les débardeurs au cheval qui souhaiteraient eux aussi, comme les machines, se voir offrir des terrains plus hospitaliers.
Pentues à l'excès, coiffées de leurs mélèzes et douglas en devenir, les parcelles sommitales du Grand Wintersberg n'entendaient pas se livrer troncs et branches, même aux plus expérimentés des débardeurs au cheval.

  • Le câble est remonté dans la pente à l'aide du cheval.

  • Le travail des chevaux consiste à attrouper les bois le long de la ligne de câble.

C'était sans compter avec la détermination des deux débardeurs d'Ile-de-France, quasi alsaciens d'adoption, peu enclins à baisser les bras et à jeter leur cordeau aux orties face à un retard d'éclaircie, fût-il engendré par une topographie extrême.

Leur botte secrète, Gilles Marty et Frédéric Destailleur l'avait apportée avec eux. Un treuil de 6,5 tonnes de traction arrimé à un tracteur de 75 CV. Débardeurs au cheval désormais câblés, les deux compères ajoutent de toute évidence une corde à leur arc. Nul ne dira que la ficelle est un peu grosse car il s'agit bien d'une innovation tout-à-fait à même de séduire les donneurs d'ordre forestiers qui peuvent ainsi limiter le nombre des intervenants sur un même chantier puisque les débardeurs sont ainsi en mesure d'accomplir toutes les tâches, de l'abattage des arbres jusqu'à l'attroupement des grumes sur l'aire de stockage.

Une fois encore, le débardage au cheval n'entend pas être en concurrence avec les moyens mécanisés mais se vit plutôt comme une solution technique complémentaire des ces moyens mécanisés.

  • Le câble à commande radio permet de descendre les bois en toute sécurité jusqu'au chemin d'évacuation.

  • Les bois sont repris au tracteur et acheminés jusqu'à l'aire de stockage où ils seront évacués à l'aide d'un porteur.

  • Combien de professions offrent ainsi à leur personnel la possibilité d'un bon déjeuner au grand air, en plein soleil, avec une vue imprenable sur les hauteurs alsaciennes ? Veinards !...

Frédéric Destailleur : 06.42.08.16.65.

Gilles Marty : 06.30.95.68.02.

dimanche 22 janvier 2012

La Montée Vers Le Wintersberg

Neunhoff. Dans l'écurie, pour un temps ressuscitée, de la maison forestière d'un grand domaine boisé à l'extrême nord du Bas-Rhin.
Gilles Marty et Frédéric Destailleur, les deux débardeurs de la région Ile-de-France, ont pour la seconde année consécutive choisi de faire une petite cure hivernale en Alsace. L'an dernier, dans le même secteur, on les avait vus travailler en association avec une équipe spécialisée dans le débardage par câble aérien.
Alors que le retour du jour est annoncé comme imminent, les deux hommes et leurs trois chevaux, deux ardennais et un breton, Odilon le plus expérimenté, Trésor le jeune qui monte et Ultime qui a encore tout à apprendre, entament la montée vers le sommet du Wintersberg qui culmine à 540 mètres d'altitude.
Le sommet en vue, la petite troupe profite d'une plateforme façonnée par l'homme pour préparer les chevaux. Le jour gagne en puissance, avec un programme ambitieux : faire remonter au-dessus de zéro cette température qui n'hésite plus depuis quelques jours à s'afficher à -5 ou -6 aux premières heures de la journée.
Le Grand Wintersberg se cache juste au-dessus, enveloppé dans une parure sombre de mélèzes et de douglas. Frédéric, arguant de sa jeunesse, achève l'ascension avec les chevaux en empruntant le plus court chemin, en dehors du sentier battu. Gilles se résoud à finir l'ascension avec le tracteur.
Cette fois, le sommet promis n'est plus qu'à quelques dizaines de mètres. La pente, qui -avec le terrain humide- est l'un des plus grands opposants au débardage forestier, avait jusqu'alors réussi à maintenir cette parcelle dans la catégorie des terrains inexploitables.
Jusqu'à ce que Gilles Marty et Frédéric Destailleur décident de "passer au câble".
Demain, la suite des aventures de Gilles et Frédéric dans les pentes du Grand Wintersberg...